Naître, Vivre, Respirer, marcher, aimer, manger, donner la vie, fonder une famille... des droits fondamentaux. Mais parfois pas pour tous.
Des jours que je partage ce qui me perce le cœur en story, en étant consciente que tout le monde ne comprendra pas forcément, et ne partagera pas mon avis.
Mais tant pis...
Je suis celle que je suis. J’ai mon vécu. Je partage une opinion et un ressenti qui me sont propres. A prendre ou à laisser.
Je ne m’en excuserai pas. Je ne m’en excuserai plus.
Le racisme existe. Il peut prendre maintes formes.
Mais avant de les lister, tâchons d’expliquer ce qu’est le racisme... on a tendance à l’oublier.
RACISME = Idéologie fondée sur la croyance qu'il existe une hiérarchie entre les groupes humains, les « races » ; comportement inspiré par cette idéologie. (Larousse).
Le racisme ce n’est pas le fait d’aimer ou pas l’étranger... c’est plus profond, c’est parfois plus sournois, plus enraciné.
C’est ce qui fut l’essence même de crimes contre l’humanité. Je ne vais pas tout détailler ici. Mais si cela vous questionne, je serais partante pour en discuter avec vous, avec amour.
Maintenant que les bases sont posées, revenons-en à ses différentes formes (liste non-exhaustive) :
c’est quand on te voit à la machine à café au boulot, pourtant accompagnée de tes collègues non noirs, et qu’on te balance à toi seule un truc du type « ben alors, tu prends ta pause ? Ah ben ca va ... pas trop vite le matin, doucement l’après-midi hein !
c’est quand, en salle de travail, sur le point de donner la vie à ton premier bébé, la SF regarde ta coupe de cheveux (des braids), et qu’elle te hurle dessus « mais c’est quoi cette pieuvre que vous avez sur la tête ? On la met comment la charlotte maintenant ? » (une amie blanche à moi s’en rappelle encore tant elle était choquée)
C’est quand au bureau, une des tes chefs te dit avec ce qu’elle pense être de la bienveillance « le candidat je sais pas pourquoi il vient. Il est noir. Mais toi tu sais c’est pas pareil, tu n’es pas noire... tu es claire. Tu es notre malgache adorée »
C’est quand une agence immobilière se retrouve déconcertée en te voyant arriver. Car à ta voix à l’accent typiquement français (ben oui... pourquoi dirait-on que c’est l’autre qui a un accent ? 🤷🏾♀️) et à ton prénom officiel à consonance française, il ne s’attendait pas à ce que tu sois noire.
C’est quand bon nombre de tes semblables sont entassés dans des cités dortoir, parfois insalubres ou avec ascenseur en panne, faute de trouver des propriétaires les acceptant, ou de banques leur accordant un crédit.
C’est quand ton mari, pourtant né en France, préfère que ce soit toi qui fasses les démarches au téléphone car ta voix « passerait mieux ».
C’est quand ta mère, pourtant lettrée et qui t’a appris à lire et écrire (merci maman d’avoir été intransigeante à ce sujet !) te demande de faire les démarches administratives pour elle, car elle a peur de ne pas être bien comprise.
C’est quand tu deviens l’écrivaine et « l’avocate » de ta belle-famille face aux méandres de l’administration, car on les mène en bateau depuis des lustres.
C’est quand, lors d’un stage en salon de coiffure, la « patronne » décide qu’elle t’appellera par ton second prénom car ça fait plus exotique et que les clients aiment bien. J’avais 16 ans...
C’est quand, en tant que doula, j’ai voulu faire mon site internet et qu’il m’a fallu choisir des photos pour l’alimenter , et qu’on me pose la question de savoir pourquoi je mettais des femmes noires en devanture. Tous les sites présentent pourtant des femmes blanches sans que personne ne les questionne.
C’est quand ton mari parvient à écourter les contrôles d’identité intempestifs, grâce à sa profession.
C’est quand, à contre cœur, tu dois dire à tes filles qu’elles devront travailler 2 fois plus que les autres pour parvenir à leurs objectifs.
C’est quand un de tes enfants rentre de l’école en te disant qu’un camarade de classe lui a dit qu’elle était « noirTe comme du caca »
C’est quand tu te dis qu’il serait opportun de donner un second prénom plus « francisé » à tes enfants pour leur éviter certaines difficultés plus tard.
C’est quand, au bureau, un collègue non noir te dit tout bonnement que « tu as plutôt bien réussi pour une noire, femme de surcroît »
C’est quand ton petit frère décède et qu’on décide de mettre la police à ses funérailles car on sait que « chez vous il y a souvent du monde »
C’est quand tu bénis le Créateur de ne pas avoir eu de garçon au vu des actualités.
C’est quand, chez le coiffeur, durant des années, personne ne savait coiffer tes cheveux et qu’aucune formation n’apprenait aux coiffeurs à sublimer les « nuages de cotons ».
C’est quand, à la maternité, ou à l’hôpital, tu pleures ou tu te plains, qu’on te regarde et te dit que les gens comme vous, ça aime trop exagérer (« syndrome méditerranéen » apprennent-ils)
C’est quand, à la TV, tu entends des journalistes débiter des choses immondes sur les étrangers, et que malgré qu’ils te piétinent à l’antenne en toute impunité, tu sois obligée de payer la redevance TV sans broncher.
C’est quand ta mère a du apprendre à l’école, bâton sur les doigts à l’appui, la leçon « nos ancêtres les gaulois ».
C’est quand à la TV, on t’annonce que le plus grand taux de mortalité face au COVID 19, c’était des gens qui te ressemblent, habitant dans le 93.
C’est quand les gilets jaunes ont malheureusement compris ce que l’on vit depuis des décennies.
C’est quand des métropolitains osent fustiger les français de la Caraïbe, car ils ont oser enlever une statue d’un homme les ayant dénigré et ayant participé à leur malheur.
C’est quand, à chaque fois que tu parles de racisme ou d’esclavage ou de colonisation , on te somme d’arrêter de rabâcher, alors que personne ne connaît réellement l’histoire de nos peuples.
C’est quand on te demande de parler ou danser « en africain ».
C’est quand certains hommes fantasment sur toi, car « les noires sont sauvages au lit »
C’est quand, trois jours après avoir accouché, la sage-femme voudrait t’imposer une contraception (pilule), que tu lui dis que tu n’en veux pas... mais qu´elle insiste durant 20 minutes en prétextant que « chez vous on connait ».
C’est quand tu as envie de pleurer quand tu captes tout ce qu’ont du endurer ceux qui t’ont précédée.
Je m’arrête là .... j’ai envie de pleurer.
STOP. Ce monde va changer. Ce n’est plus une demande . J’affirme simplement.
Ces lignes c’est ce que je ressens.
C’est ce que l’actualité me renvoie en pleine face. C’est aussi ce que je crains pour nos enfants.
Ces lignes c’est ce que je ne tolère plus. Cela nous concerne tous.
Plus personne ne pourra fermer les yeux. C’est devant vous.
Le monde des bisounours n’existe pas.
Le monde se construit et nous sommes co-créateurs du système qui le régit.
Vous n’êtes certainement pas raciste.
Mais ce racisme systémique brise des vies, des rêves et des destinées... ça doit changer.
J'ai hésité avant de poster cela ici. Je me suis demandé si cela pouvait coller à mon "activité" de Doula (ou plutôt à l’image que vous en attendiez). J’ai pris le temps d'y réfléchir, de laisser passer le coup de l´émotion . Car oui, tout ceci m’ébranle et me pousse à réfléchir, que ce soit à l’avenir, à celui de mes enfants, à celui qu’on se dessine ici en France, à celui de l’Afrique mon continent-mère, etc.
Puis j'en suis arrivée à la conclusion suivante : je suis femme, je suis noire, je suis mère, je suis doula. J'accompagne la Vie. Et cela fait partie de la vie ; de la mienne, mais aussi de la votre, que vous soyez noir(e) ou non.
J'aime être vraie, entière avec ceux que je suis amenée à rencontrer.
Comment donc partir sur des bases saines avec vous, si je dois réfréner une partie de moi ?
Ce n'est pas la Vie (quand bien même il s'agit du professionnel) à laquelle j'aspire. Ce n'est pas celle que je défends. Authentique je suis, authentique je tiens à demeurer.
Je crois en la liberté, je crois en l’égalité , je crois à l'unité (je suis fatiguée que seul le terme "fraternité » soit utilisé... et la sororité alors ?).
Et tout cela, à mon sens, est imbriqué. Je vois un lien entre ce qu'on espère pour la femme, pour le petit humain (et donc sa naissance), et ce que j'espère pour l'humanité au sens large du terme... la communauté noire y compris. La Vie des noirs compte.
Et cet épineux sujet a encore bien d'autres facettes que je ne développe pas ici : appropriation culturelle, invisibilisation, méfiance, paternalisme, .... mais le principal a été dit.
J'espère que ces quelques lignes trouveront grâce à vos yeux. Le cas échéant, cela m'aura permis de déposer ce qui me traverse, et vous aura permis de me connaitre encore un peu plus.
Voilà, j’en ai fini. Demain est un autre jour.... mais demain, c’est aussi aujourd’hui. 🌺
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